Carmina captivi principis ista lego
– Antonio d'AstiAU passage du Moyen Age à la Renaissance, la prison et l'exil sont – faut-il le rappeler? – une expérience vécue pour bien des poètes: Jean de Garencières, Jean Regnier, Charles d'Orléans, François Villon, l'anonyme prisonnier du château de Loches, Clément Marot et François Ier sont parmi les exemples les plus célebres. Malgré le poids des événements – la guerre surtout, puis les conflits religieux – et l'émergence, parallèle, d'une subjectivité susceptible d'exprimer une expérience individuelle, la prison reste un lieu emblématique de la littérature amoureuse et didactique. Le vécu s'y mêle avec l'allegorie dans des rapports, des proportions, qui changent d'un texte à l'autre; déconcerté par l'am-biguïté du discours lyrique, le critique perçoit la possibilite de lectures divergentes, voire contradictoires. De l'effet référentiel ou de l'enjeu allégorique, lequel lui faut-il privilégier, quand l'expérience de la captivité est préparée et éclairée par un fait de culture? – comment reconnaítre sous le voile de la fiction courtoise des implications biographiques que les auteurs, fidèles aux conventions du registre choisi, tendent à gommer? – les variations des effets, sensibles au sein d'un même recueil, permettent-elles d'appliquer une seule grille de lecture à l'ensemble des pièces?
Les textes résistent le plus souvent à une lecture univoque. Ils oscillent entre l'expérience vécue, suggérée par l'ancrage référentiel, souvent fugitif, et le recours au sensus allegoricus qui, transcendant le cas particulier, invite à y reconnaître un récit exemplaire, riche d'enseignements.